Cheminement d’un power user : De Windows à GNU/Linux

La première fois que j’ai croisé le mot power user, c’était chez Sebsauvage il y a plus de 10 ans.

La définition en Français « Utilisateur intensif » étant trop pauvre, je vais citer la version Anglaise de Power user : « A power user or experienced user is a computer user who uses advanced features of computer hardware, operating systems, programs, or web sites which are not used by the average user. A power user may not have extensive technical knowledge of the systems they use and is not capable of computer programming or system administration, but is rather characterised by the competence or desire to make the most intensive use of computer programs or systems ».

« Un power user peut ne pas avoir une connaissance technique approfondie des systèmes qu’il utilise et n’est pas en mesure de programmer ou d’administrer des systèmes informatiques, mais se caractérise plutôt par la compétence ou le désir d’utiliser le plus intensivement possible les programmes ou systèmes informatiques ». J’aime beaucoup cette définition car elle renvoie moins au niveau de l’utilisateur (débutant, expérimenté, etc.) qu’à son désir, son but : Utiliser le plus intensivement possible les programmes ou systèmes informatiques.

Cela me caractérise bien dans mon usage de l’informatique, bien mieux que sysadmin ou ingénieur ou administrateur systèmes et réseaux. Je ne me définis pas par un niveau mais par un désir, rechercher la manière la plus efficace d’utiliser les outils à ma disposition.

Frustration et impuissance

J’avais expliqué dans La quête mon parcours de Windows à GNU/Linux. L’élément déclencheur a été une terrible frustration : Être sysadmin, passer sa journée sur Windows Seven et ne pas pouvoir paramétrer ses outils exactement comme on le désire. J’étais au final impuissant devant ce système d’exploitation qui me limitait énormément.

Windows a beau proposer la plus large logithèque de tous les systèmes d’exploitation, on est limité et on n’y peut rien. Le système est conçu et vendu pour être utilisé par des centaines de millions de personnes, il n’est pas possible d’assurer un support, de proposer une expérience commune et cohérente si on laisse trop de possibilités et de choix aux utilisateurs.

Windows offre une base commune et solide aux débutants, professionnels, particuliers, etc. Microsoft en faisant cela s’adresse à une majorité écrasante d’utilisateurs mais se coupe totalement des usages différents ou plus pointus : Power users, curieux, bidouilleurs, hackers, « alter ».

Écosystème et culture

J’ai appris et compris que les mots à utiliser pour caractériser Windows et GNU/Linux n’étaient pas les mêmes. Windows amène une base commune et cohérente, GNU/Linux propose de faire des choix : systèmes d’exploitation (Debian, Ubuntu, ArchLinux, Fedora…) et bureaux (Gnome, KDE, XFCE, Mate…) entre autres.

Windows est finalement grand public même si il est relativement souple, GNU/Linux est exigeant car il impose à l’utilisateur de faire ses propres choix, de réfléchir à son usage, à ce qu’il veut, de comprendre et apprivoiser son système d’exploitation, de prendre ses responsabilités.

Windows est un système d’exploitation composé d’un seul bloc développé par Microsoft, GNU/Linux est un écosystème d’outils, de projets, de développeurs. systemd est majoritairement développé par Red Hat, Debian par le projet Debian, Gnome par le projet et la fondation Gnome, OpenSSH par quelques développeurs de OpenBSD.

Le support sur Windows sera assuré par Microsoft, par le technicien/sysadmin à votre boulot, par le voisin qui s’y connaît un peu. Sur GNU/Linux peu de distributions proposent du support autre que sur IRC, dans la documentation, dans les forums, avec d’autres personnes plus expérimentées. C’est une culture différente, on est bien moins assisté sur GNU/Linux que sur Windows, on est bien plus les mains dans le cambouis et à la recherche d’aide sur GNU/Linux. On est davantage sensible à l’entraide, aux tutos, aux gens qui développent sur leur temps libre, aux gens qui informent, qui dépannent. Aux gens qui sont là et qui font tout simplement.

La confiance est une question centrale qui nous habite car quand on enlève la relation commerciale et pécuniaire, il ne reste que les hommes, leur savoir-faire, leur savoir-être.

Compétences et responsabilités

Je suis chez moi à présent sur GNU/Linux. J’ai sculpté de toute pièce mon environnement informatique, celui qui me correspond au mieux, un système à mon image. Linux respecte l’utilisateur parce qu’il lui redonne le choix et les clés de son informatique. Windows se contente de masquer la complexité et de faire « les bons choix » à la place de l’utilisateur : « Pour tout résoudre, cliquez ici ».

Le problème demeure humain. Si l’utilisateur ne veut pas faire l’effort de comprendre et apprivoiser l’informatique alors il se rendra dépendant d’un tiers comme Microsoft qui entretiendra cette dépendance et en tirera ces revenus.

Dit autrement Windows est une béquille pour la majorité de ses utilisateurs, Linux est une prothèse bionique pour ceux qui se donnent la peine de l’apprivoiser et c’est définitivement l’utilisateur qui choisit entre dépendance ou pouvoir. Évidemment un grand pouvoir implique de grandes responsabilités… et pas mal de compétences.

Déjà 17 avis pertinents dans Cheminement d’un power user : De Windows à GNU/Linux

  • Très bel article. C’est bon a lire et ça résume de manière pragmatique une réalité. Une fois basculé a GNU/Linux, les autre systèmes propriétaires sont comme une prison.
  • Hello,
    Je suis un peu dans la même démarche, je commence à avoir du GNU/Linux à la maison. Par contre, au niveau pro, j’ai cru comprendre que tu es sysadmin. As-tu pu migrer ton poste de travail aussi? Ou ton environnement pro est trop orienté Windows pour pouvoir en changer?

    J’ai essayé dans mon boulot, avec une infra totalement Windows, et impossible, c’est vraiment beaucoup trop contraignant…

    xakan

  • Dans le fond je suis tout à fait d’accord, mais voulant moi même faire le bas, mon environnement professionnel me l’interdit parce qu’il n’y pas d’équivalent aux logiciels que j’utilise dans le monde de linux.
    Et même dans les rares cas où la perle rare existe, il y a tellement de problème ensuite sur les format de fichiers que cela en devient agaçant et frustrant.
    Le seul choix que j’ai c’est de passer au mac mais la c’est encore pire, on passe d’une prison à une autre prison encore plus onéreuse!
    Dommage!
  • ʟ·ɪɴᴀᴅᴀᴩᴛé
    « J’aime beaucoup cette définition car elle renvoie moins au niveau de l’utilisateur (débutant, expérimenté, etc.) qu’à son désir, son but : Utiliser le plus intensivement possible les programmes ou systèmes informatiques. »

    Je découvre aujourd’hui ce qu’est un power user et que j’en suis un (#coming out) !.. Et te rejoins dans la phrase ci-dessus.

    De se laisser porter ou d’être responsable…

    Bel article Cascador ;-)

  • xarkam
    Salut,

    tu ne peux pas dire que problème est humain. Tu devrais faire une stage comme vendeur informatique pour revenir dans le monde réelle.
    Trouverais-tu normal que ton garagiste vienne te dire qu’il serait bien de ta part de passer tes soirées à apprendre la mécanique par ce que tu as une voiture ? Le garagiste peut aussi te rétorquer que tu ne veux pas faire d’effort.
    Et c’est applicable à tout les corps de métiers.

    Donc non, tu es emprunt de mauvaise fois ou d’un manque de lucidité.

    Moi tu vois, je suis plutôt limité sous linux. Logiciel inexistant, Gnome/Kde pas foutu de faire une connexion à la volée sur un share smb si le protocole smb1 n’est pas actif. Et la liste des longues.

    Je suis exactement du même avis que Linus T., linux n’est pas fait pour les postes bureautique. Son domaine c’est les serveurs et rien d’autres. Et je suis extrêmement satisfait de me serveurs linux.

    Je suis un ancien sysadmin. J’ai bossé dans des grosses boites comme décathlon, et lorsque je lis que tu avais dans mal à faire ce que tu voulais, je ne peux m’empêcher de devenir hilare.

    J’ai toujours pu faire ce que je voulais, même installer des services à distance sans devoir me déplacer ou faire une quelconque changement sur le poste windows ciblé.

    Mais bien sur, il fallait payer pour avoir les bons outils. Ce qui me ramène à ton argument que ne pas savoir ce qu’il y a dans ces logiciels.
    J’en déduit donc que tu passe ton temps à lire le code sources de toute les outils que tu utilise. Tu ne dois pas dormir beaucoup!
    Ne me sort pas ce vielle argument comme quoi que non tu ne le fait pas mais d’autres le font. Je serai alors forcé de parler de la pile network bsd et de l’affaire d’une backdoor de la nsa dedans.

    Donc, nous avons ici un billet d’auto congratulation et de mépris envers ceux qui se refusent de venir à linux, par ce que simplement, soit ils n’en ont pas les moyens, soit ils n’en ont pas le temps pour apprendre. (je te rappel que toi il t’as fallu 5 ans selon un de tes billets)

    Par contre et tu vas trouver cela paradoxal, mais j’installe du linux chez certains clients. Pourquoi ? Tout simplement par ce que je sais que l’utilisation de leur pc sera du minitel 2.0. En somme sur surf sur le web, des mails, et quelque très rares courriers.

    Il ne leur arrivera jamais de faire de l’édition collaborative par exemple. Ho mais wait! Ça n’existe pas dans libreoffice.

    Je pourrais encore étaler plus d’arguments, mais je pense que je t’ai déjà pas mal chauffé à blanc ;)

  • alterlibriste
    Les alter sont des power users, ça me va très bien.
    Excellent article qui va me permettre de mieux me définir. Merci pour cette réflexion que je partage.
    Tu aurais pu faire une petite allusion à Apple qui est encore plus dans les choix pour l’utilisateur.
  • Jonathan
    J’apprécie vraiment ton développement et ta comparaison entre ses deux systèmes; je partage le même avis.
    Le logiciel libre et GNU/Linux en particulier a effectivement une philosophie de partage, d’entraide et de respect.
    Windows (ou même Mac OS) sont des systèmes pré-mâchés. L’utilisateur est donc totalement dépendant de ces entreprises et enfermer dans dans un écosystème logiciel. Cela fait penser à des boîtes noires auxquelles il faudrait faire confiance aveuglément.
    C’est tellement sympa de pouvoir comprendre comment fonctionne notre système et de pouvoir le paramétrer en fonction de nos goûts et de nos besoins !

    Je ne vais pas m’éterniser, il y aurait tellement de choses à dire !

    Merci pour ton article et à bientôt !

    Jonathan

  • Je suis assez d’accord. Il y a quand même des distributions qui proposent « les bons choix » d’office, et si ensuite on a envie de configurer plus finement, on peut.

    Heureusement que toutes les distribs ne sont pas non plus comme Arch Linux, parce que tout le monde n’a pas envie de passer 1/2 journée de config pour avoir un système fonctionnel.

    Récemment, je suis tombé amoureux de Solus OS. On retrouve une certaine cohérence à la Apple. Tout est développé depuis 0 (ne repose pas sur Debian ou RHEL etc). Bref, c’est du bon :)

  • Il manque le début de l’histoire, avant la frustration, où tu as développé la capacité de sortir des sentiers battus. C’est la partie potentiellement la plus intéressante je trouve. Ça se fait peut être brutalement ou au contraire très progressivement au gré des rencontres et des expériences. Moi même j’ai bien du mal à savoir ce qui m’y a conduit.

    Il faut être dans un certain état d’esprit préalable pour arriver à changer de système d’exploitation. Je connais beaucoup d’utilisateurs de Windows qui pestent contre leur système mais peu qui basculent vers GNU/Linux. La majorité ne changera rien par crainte que le ciel ne lui tombe sur la tête. Je caricature un peu mais l’idée est là.

  • Je ne connais pas KDE, mais sous GNOME, le gestionnaire de fichiers utilise GVFS pour les connexions réseau. Dans le cas du protocole SMB, ce dernier fait appel à la bibliothèque libsmbclient fournie par Samba, qui prend correctement en charge les différentes versions du protocole SMB. Pas souvenir d’avoir eu le moindre problème de mon côté. Je serais même tenté de dire que GVFS est vraiment un beau projet, qui me permet d’accéder tout aussi facilement au disque dur de ma Freebox ou à mon NAS par SMB, à mon smartphone par MTP ou mon serveur dédié par SFTP (et là, pour le coup, Windows ne le prend pas nativement en charge, celui-là :p)

    Et non, Linux ne convient pas uniquement à une simple utilisation web ou multimédia. Il existe de nombreux logiciels de qualité professionnelle dans différents domaines. Pour la création, on peut par exemple citer des logiciels libres tels que Blender, darktable ou Krita. Ou propriétaires comme Maya ou Lightworks. Parce que oui, même si tous les éditeurs ne proposent pas leurs applications sous Linux, il en existe tout de même un certain nombre.

    C’est sans doute aussi pour ça que des constructeurs tels que Dell se mettent à étoffer leur gamme de machines sous Linux.

    https://www.ginjfo.com/actualites/multimedia/ordinateurs-de-bureau/ubuntu-dell-devoile-sa-gamme-de-pc-precision-2017-sous-linux-20171116

  • Bonjour,

    l’idée que pour Linux, il faille mettre les mains dans le cambouis est devenue un peu datée: ça fait 15 ans que mes parents maintenant âgés de 89 et 82 ans utilisent Debian/Gnome sans absolument savoir qu’ils sont sous Linux et qu’ils font leurs petites affaires sans problème. Il est vrai que c’est moi qui les ai installés, mais rien de plus qu’un ordi pré-installé Windows.
    Je suis sous Linux depuis 1993 et je gère nos machines/portables/serveurs depuis cette époque: j’en serai incapable sous Windows où je me sens perdu, incapable de mettre en place une liaison réseau si ça ne marche pas « tout » seul . (sans parler d’un Mac!)
    Donc, tout n’est juste qu’une affaire d’habitude.
    Bon courage,
    Eric

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