Le bus

Dans le bus que je prends tous les matins des affichages ont été ajoutés, un carton rouge vif validation obligatoire sur les valideurs, des autocollants sur certaines vitres et à l’entrée du bus en rouge 80 par 60 cm vous entrez dans une zone non-fraudeur.

En région parisienne une part importante de la population se déplace en transports en commun : bus, train, RER, Métro. Sauf que pour le bus il y a quand-même pas mal de monde qui ne paie pas. Il n’y a en effet aucun effort à faire pour frauder, il suffit de passer devant le chauffeur. Contrairement aux transports ferrés où il faut passer les portiques dans les gares.

La compagnie de bus que je prends a donc décidé de lutter à sa façon contre la fraude et d’intensifier sa communication pour rappeler à l’ordre les fraudeurs. Elle joue sur le registre de la culpabilité et de l’obligation.

Elle met en œuvre des solutions qui ne serviront à rien ou si peu. Mettez un agent de sécurité à l’entrée de chaque bus, les gens qui ont vraiment besoin de prendre le bus paieront, les autres marcheront. Pourquoi elle ne le fait pas ? Utiliser la force (un agent de sécurité ou les forces de l’ordre) est inapproprié entre autres choses car le coût serait trop important et la faute (le délit) trop faible. Je pense également que s’il y a des débordements (insultes, coups) ça attirerait plus d’ennuis qu’autre chose à la compagnie de bus en plus d’une mauvaise publicité.

Il y a bien les contrôleurs et le chauffeur de bus qui peuvent faire quelque chose. Malheureusement les contrôleurs quand on les voit 5 fois dans l’année c’est déjà bien et puis eux aussi sont confrontés à des débordements. Il ne reste que le chauffeur de bus… qui a abandonné la bataille. Je le comprends parfaitement et je ne lui reproche rien.

J’ai connu quand j’étais môme une conductrice de bus. Il fallait avoir sa carte de transport sinon on ne montait pas dans le bus. Elle faisait respecter le silence quand il y avait trop de bruit. Parfois elle allait jusqu’à faire descendre des passagers du bus. Les années passant elle a fini par s’en soucier de moins au moins. Elle avait raison, est-ce que c’était à elle de faire respecter la validation d’un titre de transport et le calme dans le bus ? Non. Elle n’est pas payée pour se faire insulter voire agresser. Les exemples sont tellement nombreux.

Je me souviens qu’en hiver, j’avais la flemme de sortir mon pass Navigo pour badger à l’entrée du bus. Quel intérêt ? A vue de nez une personne sur deux ne badge pas et puis trop d’énergie dépensée pour ouvrir mon manteau et en sortir le pass de la poche intérieure. Quel risque ? Aucun. Le chauffeur de bus ne dira rien. Même si je croise un contrôleur, je sortirai mon pass en disant que j’ai oublié de badger ou que ça n’a pas fonctionné.

Dans la décision de frauder on prend en compte l’effort, le risque et la sanction. Aucun effort n’est nécessaire pour frauder et le risque est minime (ou au moins très mesuré) excluant la sanction.

Si le besoin de l’usager n’est pas vital, c’est-à-dire qu’il utilise le service de temps en temps mais qu’il lui est inutile de prendre un pass annuel, pourquoi cet usager paierait ? C’est la question que je me pose.

Je pense que c’est une question de respect, de vie en communauté, d’être responsable. On use d’un service, on sait que ce service engendre des coûts (ressources, temps, compétences), on accepte de payer en conséquence.

Je fais une analogie avec l’économie du Libre : Pourquoi payer pour un outil dont on se sert parfois seulement ? Pourquoi faire un don ou participer ? C’est une question de respect, de vie en communauté, d’être responsable.

Communauté au sens étymologique originel : cum munus. La communauté est donc un groupe de personnes (« cum ») qui partagent quelque chose (« munus ») — un bien, une ressource, ou bien au contraire une obligation, une dette.

Déjà 17 avis pertinents dans Le bus

  • Ce qui est étrange, c’est qu’ici, au Danemark, les gens valident. Il n’y a pas plus de contrôles qu’en France. L’amende est plus salée (100 €). Mais les gens sont plus respectueux les uns vis-à-vis des autres, et plus respectueux des conventions sociales. D’un autre côté, ces conventions sociales sont elles-mêmes moins lourdes.

    Étrange de se dire que le nombre de punks dans les rues a un rapport avec les contrôles dans les bus.

  • alterlibriste
    Il y a autre chose qui m’embete dans ton histoire.
    Quand tu avais un abonnement, tu pouvais prendre n’importe quel transport, ton titre te le permettait de droit. Maintenant, si tu dois valider, ce n’est qu’un moyen de plus de traçage (ou flicage diront certains).
    Et le pire, c’est que tu n’as même pas pensé à cet aspect, croyant que ce n’était que pour les fraudeurs qui n’auront pas plus qu’avant de problèmes de conscience.
  • Oups c’est marrant ton histoire, car ma société fait exactement ce que tu as dis:
    un carton rouge vif validation obligatoire sur les valideurs, des autocollants sur certaines vitres et à l’entrée du bus en rouge 80 par 60 cm vous entrez dans une zone non-fraudeur.

    Tu ne prendrais pas des bus de transdev? Je suis conducteur de bus chez transdev et pour info avant je faisais le flicage, dans mon bus pas de validation c’etait payez ou sortez, puis au bout de plusieurs agressions, de superieurs qui ne font rien pour faire valider, comme apporter plus de controleurs, bref, j’ai arreté, mais si on me lance la phrase il faudrait penser a mettre plus de bus, je sors aussitot de mes gonds et leurs reponds sechement il y a le nombre de bus qui va avec les validations, plus de gens valideraient ou payeraient il y aurait plus de bus.
    Rien que sur mon secteur on a baisser le nombre de bus sur les heures de pointe…

    Amicalement

  • Ce cas de figure classique serait applicable dans bien d’autres domaines de la vie quotidienne (tu parlais du Libre, mais dans le proprio c’est valable aussi, avec le nombre de copies M$, Toshop eet autres… cr@ckées).

    La solution pour faire simple est devant nos yeux : il n’y en a pas. Enfin, si, il y en a, mais elles contreviendraient fortement aux libertés individuelles (flicage, prélèvement à la source etc.). Sachons être réalistes, car de toutes façons l’on n’embauchera jamais un contrôleur par bus, tout comme on ne mettra pas un flic derrière chaque individu.

    Plutôt que de se focaliser sur ce qui ne va pas (voir le verre à moitié vide), pourquoi ne pas s’attarder sur ce qui va, sur ce qui existe ? (nous avons un putain de réseau de transport francilien – je suis du Val-de-Marne -, le pass Navigo ne coûte pas non plus un bras à l’année et remboursable à 50 % dans de nombreux cas, l’offre est considérable et nécessite une amélioration continue).

    Vous voyez où je veux en venir : à force de pointer des défauts, on rentre dans une spirale négative où l’on ne voit que ce qui ne marche pas… au risque d’en oublier ce qui fonctionne et qui mériterait davantage d’attention pour ne pas s’étioler avec le temps.

    Qu’importe qu’il y ait des fraudeurs. Ils ne paient pas ? Ils ne paient, cela ne nous regarde pas.
    Vous, vous payez vos pass Navigo ? Très bien, et c’est normal, c’est la règle du jeu.
    Ceux qui jouent trop souvent à enfreindre les règles le paieront, tôt ou tard, sous un forme ou une autre.

    Contentons-nous de ce que nous sommes, de ce que nous avons.
    Nous sommes des êtres humains, tous différents, éternellement imparfaits, et dotés de qualités et de défauts.
    Rien ni personne ne pourra changer cela.

  • Coucou,
    Je suis dans le val’doise :)
    Les solutions, augmentation des opérations « coup de point », plus de « contrôleur », descente de gare et montée de gare avec contrôle obligatoire par des équipes sur place.
    Séparation par des vitres pour le conducteur pour qu’il puisse sans prendre de coup faire demander la validation…
    Parait t’il que ce que je demande coûte cher… Pour les vitres c’est un manque de respect pour la clientèle… Normale de dire ça quand on est dans un bureau…
  • Je peux pas te laisser dire ça, désolé, mais si 50 % de personnes ne payent pas et fraudent, ça fera 50% de bus en moins!
    50% te semble beaucoup? C’est ce qu’on a sur certaine de nos lignes, mais a vrai dire la plupart c’est 30/40% de fraude…
    Bref, ceux qui fraudent ne seront pas punis, c’est ceux qui payent qui sont punis, pourquoi a ton avis l’augmentation des tikets? des pass navigo? Sans parler de ça, pourquoi sur certaine ligne il y a pas autant de bus que ce qu’il faudrait? Ceux qui payent sont coller les uns aux autres car si plus de payeurs et moins de fraudeurs, il y aurait un articulé la ou c’est possible au lieu d’un standard, il y aurait sinon pour le reste ou c’est pas possible de mettre un articulé, des départs plus frequents…

    Bref, sortie de gars routière, opération coût de poing, des moyens pour le conducteur, beaucoup de chose sont possible…

  • Délit trop faible, quand tu sais que la radio c’est dans les 100€ d’amende, que la gêne c’est déjà 40€ minimum.
    Dans ma société, on a des personnes payer pour intervenir dans les cas de forces majeurs ou accompagner les contrôleurs, quand tu sais qu’ils sont payer deux fois plus qu’un conducteur (ou presque) et que la plupart du temps ils se promènent pour mettre a jour les horaires sur les arrêts…. Bref je te dis pas tout mais il y a de la dépense mal répartis.

    Amicalement

  • Demain je vais etre sur une ligne qu’on sait exactement qu’il y a 1 ou 2 personnes qui payent sur 10… On continu de la faire car la mairie compense…
  • Stephanoux
    Salut,

    Je pourrais faire un copier-coller du commentaire de 22décembre, juste remplacer Danemark par Canada. Sinon au niveau contôle ici ce sont les chauffeurs qui s’en charge le plus souvent. Il faut dire qu’en dehors des heures de pointes, il y a pas grand monde dans les autobus. Cela facilite la chose.

    Il y a peu, on a vu toutefois apparaître des agents de contrôles qui ont d’ailleurs plus l’air d’une police para-militaire. Ca m’a vraiment étonné car j’ai jamais eu l’impression que la fraude est une calamitée ici, bien au contraire (par exemple, jamais vu passer quelqu’un au dessus des tourniquets dans le métro). Je pense qu’il s’agit avant tout de garder le contrôle de la situation tant que c’est possible et surtout d’envoyer un message visible, aussi bien à ceux qui sont réglos qu’à ceux qui auraient l’idée de frauder.

    Cela dit, sans dire qu’il faut un agent de contrôle pour chaque autobus, il me semble qu’il est facile de mettre l’accent sur les lignes qui posent le plus de problème mais quoi qu’il en soit, il est clair que la répression n’est pas la (bonne) réponse unique, comme dans la plupart des autres domaines d’ailleurs.

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